jeudi 30 octobre 2014

Kenya, les locaux, les Safaris, et la migration des gnous à Masaï Mara!

Encore une fois, je m’apprête à découvrir un pays au nom évocateur. Pensant à ce dernier, fermant les yeux, il se dessine dans mon esprit la nature sauvage, de grands espaces, une forte identité culturelle… Pour cette raison, et cela depuis des années, c’était une destination qui me faisait rêver, dont j’ai toujours voulu fouler le sol. L’expérience vécue sur place ne sera pas, pour la majorité du séjour, comme j’aurais pu l’envisager en début de voyage. Mais les envies chances, les intérêts aussi. Je n’ai plus envie de courir. Je ne recherche pas à en voir le plus possible, même si j’ai toujours soif de découvertes de lieux uniques, principalement concernant la nature, encore plus quand elle reste à l’état sauvage… Je sais pertinemment, dans le lapse de temps imparti, et financièrement parlant, dans ces pays où les activités touristiques sont extrêmement chères, que je ne pourrais pas tout visiter. Les rencontres précédentes et l’envie de passer du temps avec les locaux, vont conditionner un peu les étapes de ce voyage ainsi que le temps passés dans les différents lieux. La première étape de ce voyage au Kenya augure de belles choses pour la suite du séjour!
Avec Herbert, le couchsurfeur qui m’a accueilli à Kampala, nous prenons la route, en début d’après-midi, ce vendredi 8 Septembre 2014. La sortie de la capitale ougandaise n’est pas facile. En raison de gros travaux, nous restons à l’arrêt, dans le trafic, pendant plusieurs heures. Nous avançons au ralenti, mètre après mètre, pensant que ce périple pourra être très long, s’il continue dans la même dynamique. Heureusement, après être sorti de la très grande agglomération, avoir franchi l’endroit où la route est en reconstruction, nous reprenons notre course en avant vers l’Est. Nous arrivons à la frontière avec le pays d’origine à Herbert, alors que la nuit est tombée depuis longtemps. Il est 20h00 passé et notre bus s’arrête là. Economiquement parlant, c’était beaucoup plus intéressant pour nous de prendre un minibus jusqu’à la frontière, puis un autre après avoir traversé cette dernière. Avec le retard important pris lors de la première étape, nous ne sommes pas sûrs que nous allons pouvoir couvrir la totalité de la distance souhaité pour atteindre, le soir même, notre destination finale; Kisumu!

Premièrement, nous devons franchir la frontière. Herbert, avec son permis de travail ougandais, et son passeport Kenyan, ne doit même pas se présenter aux autorités. Il franchi l’un puis l’autre des postes frontières, sans même sortir ces papiers ou se faire contrôler. Si j’avais envie, en cette soirée, où nous sommes les seuls à traverser, j’aurais pu le suivre, faire de même. Personne ne m’aurait arrêté, contrôlé, ou demander des comptes… Je ne peux pas et veux pas jouer avec cela, surtout que les conséquences sauraient tout autre pour la sortie du pays quelques jours plus tard. J’espère simplement que les informations que j’ai en ma possession vont se confirmer. Il est dit qu’avec le visa Kenyan de 3 mois, même à une seule entrée, je peux revenir sur le territoire sans avoir à payer de nouveau ce sésame d’entrée. Cela est vrai si tu es sorti par voie terrestre en Tanzanie ou en Ouganda, les pays limitrophes, et que la validité de ce dernier n’est pas périmé.  Or j’ai acquis et utilisé ce dernier lors de mon transit via Nairobi, entre la Tanzanie et l’Ouganda. Si j’en crois ces régulations pour le visa, je ne dois pas repayer et facilement entrer de nouveau sur le territoire Kenyan. La sortie du territoire ougandais est une simple formalité. Il n’y a pas de visiteur au comptoir d’enregistrement des sorties. Après avoir vérifié la validité de mon visa, un officiel très sympathique me tamponne mon passeport. Il me dit que je peux procéder à la prochaine étape en me rendant dans les bureaux de ces homologues kenyans. Je suis reçu par une femme très agréable aussi, qui m’accueille avec un grand sourire. Je pensais que j’allais devoir me justifier, lui montrer mon visa, les dates et  lui expliquer pourquoi je pensais être dans mon «bon droit» pour ne pas repayer mon visa. Il n’en sera rien! Elle scanne mon passeport, revérifie les dates de mon visa, puis tamponne à nouveau ce dernier avant de me souhaiter la bienvenue dans son pays. En moins de 10 minutes, j’ai donc effectué les démarches administratives et je suis parfaitement en règle. Je rejoins Herbert qui m’attend à quelques mètres de là.

Nous  explorons cette ville frontalière à la recherche d’un véhicule public qui partirait ce soir en direction de Kisumu. Nous nous apercevons très rapidement qu’à cette heure tardive nos chances se sont amenuisées. Après avoir vérifiés deux ou trois endroits stratégiques, après avoir demandé à des locaux, nous comprenons que ces dernières sont inexistantes. Si nous n’étions pas un peu aventurier une seule solution s’offrirait à nous; dormir sur place puis partir le lendemain au petit matin. Mais Herbert n’a qu’un week-end au Kenya, avant de repartir à Kampala. Il veut donc en profiter un maximum. Nous savons aussi que ces amis nous attendent sur place et qu’un bon lit sera alors à notre disposition. Nous décidons donc de forcer le destin et d’utiliser une solution alternative. Il y a très peu de particulier sur ces routes kenyanes, encore moins après la nuit tombée surtout que nous désirons effectuer une longue distance; plus de 100 kilomètres. Nous nous rapprochons d’une station essence et de chauffeurs routiers stationnés non loin de là. Le pompiste nous aide dans notre démarche. Il nous indique un camion qui part à Mombasa et qui pourrait peut-être nous déposer en chemin. Seul l’aide chauffeur est présent. Nous attendons donc de longues minutes que le chauffeur revienne pour lui demander si oui ou non, il accepterait de nous faire cette faveur. Après un cours échange avec lui, il accepte. Nous devons néanmoins payer la course, le même prix que nous aurions payé pour un trajet en minibus. Nous n’hésitons pas un instant, ça nous convient comme arrangement. Ce chauffeur et son assistant sont sympathiques, curieux et ouverts d’esprit. Nous échangeons sur divers sujets. Nous apprenons mutuellement les uns des autres. Nous faisons, après plus d’une heure de route, une pause repas dans un restaurant locale. L’assistant et Herbert mangent du poulet avec de l’Ugali (pâte blanche locale faite à base de céréales et qui est, comme en Tanzanie, le plat le plus commun pour les locaux).  Avec le chauffeur, nous penchons plus pour un thé au lait avec des petits beignets. Nous arrivons finalement à Kisumu alors que minuit est passé.

Nous rejoignons Jacob, l’ami kenyan d’Herbert, et Paula, sa fiancée Polonaise. Nous les retrouvons à la sortie d’un bar. Nous prenons immédiatement un tuk-tuk, pour nous conduire à plus de 20 kilomètres de là, dans la petite localité d’Ahero, où habite la famille de Jacob. Nous allons passer tout le séjour chez lui. En attendant nous sommes sur la route. Je suis être immédiatement plongé dans le système corrompu, à différents niveaux sociaux, de ce pays. En effet, des policiers ont levés un barrage en plein milieu de la route. Ils stoppent une majorité des véhicules. Nous n’y coupons pas! Ils constatent très rapidement que nous sommes 4 et non 3 comme autorisé pour ce moyen de transport. Ils constatent aussi que l’assurance du conducteur est périmée. Ils commencent donc à jouer avec nous. Ils nous font descendre du véhicule. Ils commencent à nous menacer de prison car nous n’avons pas respecté les règles de remplissage de ce véhicule et que nous n’avons pas vérifiés les papiers du chauffeur. Ils essaient de nous faire peur, de nous intimider pour ensuite nous soutirer  le plus d’argent possible. Le fait que nous soyons 2 «Mzungo» n’aident pas aux négociations. Paula leur tient tête. Elle leur dit qu’elle se propose en tant que volontaire pour être détenu dans les geôles de la ville… Ceux sont finalement Jacob et le chauffeur qui finissent les négociations en nous éloignant des débats. Après quelques minutes complémentaires, nous reprenons la route tous ensemble, libre de nos mouvements. Un petit billet, glissé dans la main d’un des officiels, a aidé à obtenir un dénouement heureux et rapide.

Il est plus de 2h00 quand nous arrivons finalement sur le terrain dont est propriétaire la famille de Jacob. Au Kenya, la tradition dicte que les garçons, comme les filles vivent dans la même maison, et souvent la même pièce, que les parents pendant leur enfance. Mais, dès qu’un garçon atteint l’âge adulte, et si la famille a les moyens, ils construisent, sur le terrain familial, un habitat indépendant pour chaque garçon. Jacob nous accueille donc chez lui. Personne ne souhaite pousser la soirée plus loin et continuer à échanger sur divers sujets. Nous allons avoir le temps dans les prochains jours. Nous gagnons quasiment immédiatement nos lits. Je m’endors instantanément après mettre mis en position allongée.
Le lendemain, je découvre, de jour, l’aspect rural de la localité, où ils habitent. Ils vivent sur un grand terrain près de champs appartenant à la famille et aux voisins. Ils n’ont pas ici l’électricité, ni même l’eau courante. Il est nécessaire de puiser  manuellement de l’eau au puits à chaque besoin. Le puits qui se trouve dans leur jardin donne accès à de l’eau assez propre pour servir à la douche mais aucunement pour être consommée directement et pour être bue. La douche consiste en 3 petits murs en bois, installé derrière la maison en terre de Jacob. Après un petit-déjeuner copieux, préparé par une de ces petites sœurs, nous partons découvrir les plantations de pastèques qu’ils ont commencées pour la première fois. Ils les ont plantés, il y a moins de 2 mois, dans le but de gagner de l’argent et de pouvoir grossir leurs cultures  et se diversifier ultérieurement. Seules quelques petites pousses émergent d’une terre assez sèche. La pastèque a besoin de beaucoup d’eau pour pousser. Si les pluies tardent à venir, ils auront besoin de mettre en place un système d’irrigation efficace depuis la rivière qui arpente la région et passe à quelques hectomètres du terrain qu’ils louent. Cela serait alors coûteux en temps et en argent. Ils espèrent qu’une bonne étoile veille sur eux. Les jours suivant infirmeront ou non la tendance et les choix qu’ils devront faire. Après avoir pris notre temps lors de la matinée, nous décidons de rejoindre Kisumu pour vaquer à diverses activités. Encore une fois, en raison du programme lors des heures et jours suivants, je prends conscience de la globalisation mondiale, de la standardisation des envies de tous. Au détriment de la culture et des modes de vie ancestraux, les nouvelles générations cherchent à copier un modèle américain loin d’être parfait. Ce dernier poussant à la consommation, dicte la vie de jeunes, qui rêvent d’être des stars, de pouvoir flamber et dépenser sans compter.

Les premières heures à Kisumu ne sont pas représentatives de ce que je viens de d’écrire mais les suivantes oui. Après être descendu du «Matatu» (minibus de transport en commun), nous faisons plusieurs rencontres d’amis de Jacob ou d’Herbert. Nous discutons tranquillement tout en continuant à marcher. Nous rejoignons ensuite un parc où Herbert a prévu de voir son frère qui fait partie d’un groupe de volontaires, mêlant Kenyans et étrangers, venus pour quelques mois. Jacob et Herbert faisaient partie de cette organisation auparavant. Ils ont été très impliqués dans son organisation et son développement. Les deux groupes se mélangent. Je discute avec deux allemandes et une française. Après plus d’une heure ensemble, nous nous séparons. Avec Paula, Jacob et Herbert, nous déjeunons dans une petite gargote qui sert des plats locaux. Du poulet fermier local, cuit au feu de bois, est notre choix à tous. Jacob et Herbert l’accompagneront d’Ugali, alors qu’avec Paula, nous choisissons des chappattis, avec des légumes. Après avoir déambulé dans les rues de la ville, ils décident de faire quelques courses dans un des grands supermarchés de la ville. Ils font les provisions d’alcool et de boissons sucrés pour le début de soirée. La bière et la Vodka sont les breuvages choisis. 

Nous nous rendons sur les bords du lac Victoria que nous avions laissés à Kampala. En effet, ce lac gigantesque partage ces rives avec 4 pays. Ce lac navigable est surtout une source quasi-intarissable de poissons, plat typique, fameux et délicieux de la ville de Kisumu, que je aurais l’opportunité de goûter, à plusieurs reprises, pendant la suite de mon séjour. Nous nous rendons à «Hippo Point», très couru par les jeunes de la ville pour s’y retrouver le week-end. Nous y retrouvons les volontaires avec qui nous passons le reste de la soirée. Nous sommes assis dans l’herbe, avec la vue sur le lac. Des jeunes passent en bouclent de la musique africaine moderne ainsi que les dernières musiques hip-hop, Rnb et de Rap américains, qui font les hits parade ces derniers mois. Nous échangeons sur divers sujets. Tout le monde se mêle les uns les autres. Le coucher de soleil ne sera pas celui attendu. Après une belle journée ensoleillée, avec une chaleur pesante, de gros nuages gris chargés d’eau ont rapidement faits leur apparition, poussés par des vents qui ont augmentés en intensité. Le soleil n’a pas le temps d’arriver à l’horizon que d’énormes pluies s’abattent sur nous. Nous trouvons tous refuge sous un chapiteau monté par des locaux pour un événement spécial. Le vent est tellement fort que nous devons tenir fermement les structures métalliques, au risque qu’elles s’envolent. Dès la première accalmie, nous décidons de rentrer en ville. Peu de moyen de transport sont disponibles directement sur place. Nous marchons donc sous un petit crachin entre 2 averses. Un tuk-tuk à vide passe à proximité de nous. Nous décidons donc de louer ces services. Nous montons à 13 dans cet engin prévu normalement pour 3 passagers. Nous rigolons bien et passons de bons moments avant de rejoindre la ville. 

Après un dîner dans un restaurant local, nous décidons à l’unanimité de nous rendre dans un bar-dansant. Cela fait longtemps que je n’ai pas mis les pieds dans un tel endroit. La salle principale est bondée. Elle ne va pas se désemplir au cours de la soirée, bien au contraire. L’ambiance ressemble en tout point à celle que nous pouvons trouver dans les discothèques en France. Seule la musique est un peu différente. Mais tout le monde a un verre à la main, passe son temps à observer son voisin. Certains, comme nous, sont simplement venus pour passer du bon temps entre amis et danser. D’autres sont à la recherche d’une personne du sexe opposé pour s’amuser et plus si affinité. Je suis presque choquer par les mouvements de danse de filles qui se trémoussent et bougent leur postérieur devant des hommes  qui se positionnent par derrière comme lors de l’acte sexuel. Cela va bien au-delà de la sensualité que tu peux trouver dans des danses comme le rock, le tango, la salsa, même plus important que dans la bachatta.  Si les personnes ne porteraient pas de vêtements nous assisterions à une vraie orgie. J’avais déjà vu ce genre de danse, même chez des femmes musulmanes, à  Zanzibar. Je trouve cela déplacé mais la société actuelle est en grande partie responsable de ces comportements. Les clips des stars actuelles ont promus ce mouvement, en étant les premiers a adoptés ces «pas de danse», devant la caméra. 

Ce n’est plus vraiment le genre d’endroit que j’affectionne fréquenté. J’aime pourtant danser. S’y rendre avec un groupe de jeune tous motivés, avec qui nous avons passés un bon début de soirée, est le meilleur moyen et le seul envisageable maintenant pour moi, afin de profiter de ce genre d’endroit. Et puis cela me plonge dans la culture locale des jeunes générations. Le contraste est énorme avec la vie de tous les jours de la majorité des Kenyans, qui vivent dans des cases en terre séchée, avec une structure en bois, sans électricité ou eau courante. Beaucoup de jeunes ont besoin de cela pour sortir de leur quotidien morose et monotone. Malheureusement beaucoup d’entre-eux deviennent alcooliques. Ils le sont du matin au soir. Sur les bords de la route, au niveau des stations de Matatu, je peux en voir beaucoup. 
Le lendemain, dimanche après-midi, nous retournons à Kisumu. Nous nous sommes donné rendez-vous avec tout un groupe de Couchsurfeur, au bord de la piscine d’un grand hôtel. La journée est beaucoup plus tranquille mais agréable. Herbert nous quitte en milieu d’après-midi pour rentrer à Kampala. Nous finissons la soirée, une nouvelle fois à «Hippo Point» où de jeunes musiciens locaux se produisent. Une fois encore, il est impressionnant de voir l’influence de la culture américaine dans ces pays en plein développement, mais qui ont maintenant un accès aux informations mondiales et internationales, par le biais d’internet et de la télévision. 

Les jours suivants, je passe principalement mon temps dans la campagne environnante, autour d’Ahero. Une journée nous retournons, avec Jacob et Paula, à Kisumu, pour assister à une journée de présentation des jeunes artistes locaux; musiciens et acteur, dans une salle de cinéma. Une fois encore il est intéressant de voir l’influence flagrante du mode de vie occidentale, de la perte de la culture locale de leurs ancêtres. Heureusement certains rituels restent omniprésents dans leur société mais il est à craindre que ça se perde rapidement, dans les prochaines années tout au plus, pour ne laisser place qu’à des rassemblements folkloriques, en souvenir du passé, ou dans un cadre aseptisé pour touristes. 

Sinon, je passe beaucoup de temps avec Jacob et sa famille (sa maman, deux de ces sœurs et ces petits neveux). Nous cuisinons et partageons les repas ensemble. Avec Jacob, je discute des rivalités encore omniprésentes entre les différentes tribus. Il est Luo et estime appartenir à cette ethnie, beaucoup plus qu’au Kenya, pays pour lequel il ne développe aucun sentiment nationaliste. Je comprends dans ces mots la rancœur qu’il existe, en lui, pour les Kikuyu, ethnie majoritaire, qui détient le pouvoir du pays. Ils me les décrient comme des barbares, profiteurs, avec qui je vais obligatoirement avoir des problèmes. J’essaie de le résonner mais je constate très vie que rien n’y fait et que cette haine est bien ancrée en lui. Je ne prends pas tous ces dires au pied de la lettre. Je sais qu’il est trop impliqué pour être même un minimum objectif… Je décide de me faire ma propre opinion après avoir aussi passé du temps avec les Kikuyu. 

Les journées sont majoritairement belles et ensoleillés alors qu’en soirée, après de fortes chaleurs, les nuages ont tendances à apparaître. Quelques gouttes s’écrasent quasi-quotidiennement sur la terre rouge et sèche des paysages environnants. Lors de la dernière soirée, alors que je rentre à pied chez Jacob, une pluie fine commence, puis elle s’intensifie rapidement. J’arrive à me réfugier dans une maisonnette d’un gardien d’un bâtiment public juste à temps. Une nuée s’abat maintenant sur la région, et cela pendant plus de 40 minutes. Je suis ravi d’avoir trouvé ce refuge, sinon en moins de 2 minutes, j’aurais été détrempé. Cela n’a pas d’importance me concernant car «je ne suis pas en sucre», mais ça m’aurait beaucoup plus ennuyé pour tout mon matériel électronique qui se trouve dans mon sac-à-dos. Après une grosse accalmie, je décide de quitter mon hôte, qui a été des plus accueillants. Je retrouve la maison de Jacob après avoir essayé d’éviter les flaques d’eau et les mares de boue sur le trajet, en vain! Même devant la maison familiale c’est un «petit lac» qui s’est créé. Je suis heureux de pouvoir enlever mes vêtements mouiller, me réchauffer auprès du feu, en sirotant un thé chaud. Contrairement aux idées préconçues, ancrées dans ma tête, depuis mon plus jeune âge par les médias, les informations que l’on nous donne sur ce continent et notre éducation, il ne fait pas chaud partout et toute l’année en Afrique. Il n’y a pas que des régions arides ou désertiques. Ici, au Kenya, pas très loin de la vallée du Rift, surtout à cette période de l’année, pendant la nuit les températures peuvent être fraîches, surtout quand la pluie rentre dans l’équation.  Quoi qu’il en soit, je passe une très belle dernière soirée avec toute la famille, principalement en partageant un repas que Jacob a préparé.
J’ai trouvé, à la dernière minute, un Couchsurfing dans la ville de ma prochaine destination; Nakuru. Je ne sais pas du tout à quoi m’attendre car ce jeune n’a pas de référence ou d’amis sur le site. Son profil n’est pas bien rempli. Je crois pourtant en ma bonne étoile et j’espère que l’expérience sera belle. La route, entre les deux villes, traverse de beaux paysages, mais elle est en très mauvais état. Ce qui fait que le voyage n’est pas de tout repos. Après plus de 200 kilomètres à zigzaguer entre les trous, ou à bondir du siège, quand nous tombons dans un de ceux que le chauffeur n’avait pas vu, je rejoins le centre-ville de Nakuru. Fredrik, 28 ans, vient me chercher à la gare routière. Il semble très réservé mais sympathique. Nous ne restons pas dans le centre-ville mais nous prenons directement un Matatu pour se rendre dans le petit village Mbaruk, où il habite, avec ces parents. Il a déjà travaillé à Mombasa et Nairobi, pris son indépendance vis-à-vis de ces parents. Mais la perte de son emploi ou sa dernière démission, l’ont fait revenir dans le cocon familiale. Son frère Simon, qui a été marié, est dans la même situation. L’accueil est très chaleureux. Je sens tout de suite que la maman, prénommée Mada, est aux petits soins pour ces fils comme elle va l’être pour moi.

J’ai le droit à ma propre chambre, dans une maison très sobre mais assez grande. Après avoir discuté autour d’un thé au lait de bienvenu, nous prendrons le dîner assez tôt. Il s’agit d’Ugali avec des légumes verts. Une journée vient encore de s’écouler et se terminer sans que je m’en rende compte. Le lendemain, nous partons, avec Fredrik, en direction de la ville. Nous nous arrêtons en route pour visiter une de ces amies, qui fut son ancienne employeuse, quand il travaillait dans la production de yaourts. Elle fait très jeune mais elle a plus de 45 ans. Elle a déjà un fils du même âge que mon hôte. Elle nous accueille les bras ouverts. Elle se montre très hospitalière. Elle nous offre après plus d’une heure de discussions, un repas à base de chappattis, légumes et foie de veau. Ayant des obligations ultérieurement, nous la laissons vaquer à ces occupations à la fin du déjeuner. Nous gagnons la ville, où Fredrik me montre les principales attractions. Je me connecte aussi à internet et nous finissons par quelques courses de produits de base, que j’achète pour la famille.
J’ai vraiment envie de découvrir le Parc National du lac Nakuru qui se trouve en bordure de la ville. Ce lac est réputé pour sa colonie de millions de flamants roses. Malheureusement deux éléments jouent en ma défaveur pour apercevoir une des 2 stars de cette réserve. Normalement, il s’agit d’un lac très peu profond qui a permis le développement de micro-organismes et d’algues, dont raffolent ces oiseaux. Depuis deux ans, la donne a changé. 3 rivières se jettent dans ce lac et un éboulement à provoquer la fermeture du seul écoulement de sortie. Il en résulte une augmentation conséquente du niveau de l’eau, détruisant le garde-manger des flamants roses. L’augmentation de la pollution vient compléter la dégradation de leur environnement. De plus, nous sommes à la période de la reproduction, où ils migrent annuellement vers le lac Neutron, au nord de la Tanzanie, près de la frontière kenyane. Mes chances de revoir le même spectacle que dans le Sud Lipez, en Bolivie, sont donc réduites à néant. J’ai pourtant toujours envie de m’y rendre, principalement en raison de la présence des rhinocéros à corne blanche et noir que l’on peut voir quasi-assurément ici, alors que c’est très rare dans les autres parcs du pays et même de cette partie de l’Afrique. J’aime la nature sauvage de cette partie du monde. J’ai donc envie d’en profiter un maximum tant que je suis sur place. 

Je recherche néanmoins la solution la plus économique pour me rendre dans le parc. Le prix d’entrée est fixe et exorbitant pour les étrangers car il est de 80$US pour 1 journée. Fredrik et sa maman vont tout de même me donner la meilleure option financièrement parlant. Tous les week-ends, il y a, en effet, un car tout-terrain étatique, dédié à ce parc, qui part du centre-ville. Un garde forestier sert de guide. Il emmène gratuitement (exception faite du droit d’entrée) toutes les personnes intéressées. Je  sais que ce périple ne sera pas le plus optimal pour l’observation des animaux car je vais être bloqué sur un siège d’un côté de ce gros bus pas très maniable. Mais, par la même occasion, je me vois bien partager l’expérience avec les locaux et des gens très différents.  Une nouvelle expérience m’y attend, c’est une certitude. Fredrik m’accompagne en ville. Nous sommes au lieu de rendez-vous à 8h00. Ce car partait originalement tôt le matin car une deuxième cession avait lieu l’après-midi, du samedi et dimanche. Il n’y en a maintenant plus qu’une par jour. Elle ne démarre plus avant 11h00. Nous attendons donc en discutant, pendant plus de 2h30, avant que le bus ne pointe le bout de son nez. 

Lors de son arrivée, de nombreuses personnes, mêlées à la foule de badauds, sortent des rangs pour s’agglutiner devant le bus, qui est toujours en mouvement. Le chauffeur fait des manœuvres pour être prêt à repartir dans l’autre sens. Après que ce dernier se soit stationné, notre futur guide, agent de ce Parc National, prend la parole. Il nous explique comment va se dérouler la demi-journée. Je monte ensuite dans ce véhicule imposant, seul «Mzungo», parmi un attroupement de Kenyan avec des enfants. Je prends place, à côté d’une fenêtre sur l’aile gauche. Avant même de m’assoir, je vérifie bien que je puisse faire coulisser cette dernière et avoir ainsi une vue dégagée sur ce que je pourrais observer à travers cette structure métallique. Une femme seule avec son fils s’assoit juste quelques secondes après moi sur la banquette qui fait face à la mienne, de l’autre côté du couloir. Je la salue et instaure un premier contact. Très vite nous sympathisons! Après de longues minutes d’attente sur le parking du centre-ville,  nous prenons finalement la route du Parc National de Nakuru. Le bus déjà bondé va continuer de se remplir sur la route et à l’entrée principale du Parc. Nous nous serrons sur les banquettes. Avant cela, nous devons individuellement payer notre droit d’entrée. 
Une fois l’aspect administratif et financier réglé, nous pouvons entrer dans l’antre de ce parc! Nous allons premièrement, et très rapidement, prendre conscience du mal qui ronge ce parc, du problème écologique auquel il est confronté. En effet, après une longue ligne droite, et seulement quelques centaines de mètres de descente, nous arrivons en bord du lac. Des bâtiments sont laissés à l’abandon. Surtout, l’eau a envahie certains d’entre-eux. La montée du niveau des eaux est ici flagrante. Des constructions ont les pieds dans l’eau, des routes sont coupées et s’enfoncent maintenant dans le lac. Le plus impressionnant concerne la forêt d’arbres qui se meurent. Ils sont maintenant totalement dénudés. Ils se reflètent dans l’eau qui a recouvert toute la terre, sur un périmètre de plusieurs hectares, à cet endroit du parc. Nous descendons du bus pour prendre la pleine mesure des conséquences de la montée des eaux. Seuls quelques oiseaux qui flottent tranquillement sur l’eau ne semblent pas prendre conscience de la gravité de la situation. Ils ont au moins le pouvoir de rendre ces lieux plus paisibles et d’essayer de relativiser. Remontant dans le bus, nous commençons ensuite réellement le safari. En premier, nous observons des antilopes, des zèbres, des buffles. Ils se trouvent de toutes parts du bus. Il est facile de ne plus savoir où donner de la tête. Je me concentre néanmoins sur les animaux qui se trouve de mon côté. Je ne vais pas déranger mes 2 compagnons de banquette, à chaque fois que j’aimerais observer ce qui se passe de l’autre côté. C’est une vraie limitation de l’observation de la nature environnante. Je dois être honnête cela sera une vraie frustration pour moi. En effet, particulièrement dans ces moments, j’aimerais être le premier à voir. J’ai envie de tout observer et prendre le temps d’observer encore et encore ces animaux sauvages. Une autre frustration concerne le temps que l’on reste devant telle ou telle espèce. En effet, ce n’est pas un tour privé. Il faut satisfaire tout le monde et surtout rester dans le cadre du temps imparti sur le terrain. 

Bizarrement, je passe outre, sûrement car je sais que, dans quelques jours, je repartirais dans un des plus fameux parcs animaliers au monde. Ça sera cette fois-ci en petit comité, dans un petit bus, avec plusieurs jours de prévu, pour l’observation des animaux, non quelques heures seulement. Je pense surtout que j’accepte cette limitation visuel et en temps, en raison du partage avec les locaux. Je vis une expérience particulière avec des personnes très sympathiques, souriantes, curieuses… Depuis le début de ce séjour en Afrique, c’est un fil rouge quasi-quotidien. Les habitants des différents pays traversés ont su me transmettre leur sens de l’accueil sans bornes, leur enthousiasme, leur envie de s’en sortir et d’aller de l’avant, d’apprendre de l’autre… L’expérience insouciante, que je vais vivre dans le bus, en ce début d’après-midi, ne fait que confirmer cette tendance! Avec Grâce et son fils Diego, nous accrochons vraiment. Elle me dit étonné de le voir si facilement se rapprocher de moi. Elle me dit qu’habituellement, il est très méfiant et distant, surtout vis-à-vis des hommes. Assis à côté de moi, il a pourtant envie de jouer, de me monter sa petite console portative, d’apprendre à se servir de mon appareil photo. En fin de matinée, nous sommes déjà devenus des amis! 

Nous nous arrêtons à un point de vue dominant le lac entier. Nous pouvons admirer la région alentour à des dizaines de kilomètres à la ronde. Nous pouvons observer des babouins, des lézards, semblant venir d’un autre temps aux couleurs orange et bleues, de petits rongeurs qui essaient de récupérer les moindres miettes de pique-niques que les visiteurs laisseront. En parlant du déjeuner, je vais partager avec Diego le mien et Grâce me paie une boisson sucrée. Encore une fois, le partage est le maître-mot de cette journée avec les kenyans. J’ai aussi des discussions très intéressantes avec notre guide. 
Après plus d’une heure sur place, à profiter des paysages et de l’interaction directe avec les animaux, nous reprenons notre route en avant ! Nous voyons les mêmes animaux que précédemment. Puis le bus se stoppe au milieu de la piste. Le guide plaisante avec un jeune homme,qui a dit à sa maman qu’il vient de voir un léopard dans un arbre. Personne au début ne le prend au sérieux. Mais dans le doute, le guide demande au chauffeur de faire marche-arrière.  Il arrive avec une dextérité impressionnante à manier cet engin. Il recule sur plus d’un kilomètre, évitant les trous et prenant les virages, sans sourciller et en ralentissant à peine. Le guide dit au garçon qu’il lui tirera les oreilles si ce n’est pas vrai. Le petit garçon a mis du temps à prévenir son entourage mais il avait parfaitement raison. Sur la droite du véhicule, nous pouvons observer, pendant quelques secondes, un léopard descendre de sa branche, avant de s’enfoncer dans les fourrés. La tension a été à son comble et le moment vécu, auprès de cet animal, très fort. Etant du mauvais côté du véhicule, je ne peux pas prendre de clichés décent, mais je peux, sans problème, l’admirer à travers les vitres un peu sales du véhicules. Encore une fois, je peux m’estimer très chanceux, d’avoir été en présence de cet animal sauvage, que l’on voit très peu dans ce parc, car il est très dense en végétation et que le léopard n’est pas un animal social. 

Ce n’est pourtant pas une fin en soi. Nous repartons, en avant, sur les chemins de ce parc. Nous n’avons vraiment plus l’impression d’être en bordure d’une des grandes villes du pays. Pourtant seul des clôtures électriques permettent encore de préserver les intérêts des animaux sauvages, des paysans et des citadins de Nakuru.  Sans elles, la cohabitation ne serait pas possible et certains devraient disparaître. Heureusement la gestion de ce parc est bonne. Nous pouvons donc continuer sereinement à admirer les animaux. Après avoir revu des cervidés et bovidés, nous nous arrêtons à une autre extrémité du Parc. C’est le deuxième endroit, où nous avons le droit de sortir du véhicule, pour nous promener, en relative sécurité, près de la principale cascade de ce parc. Une fois encore avec Grâce et sa sœur, Diego et sa cousine nous nous amusons drôlement bien en prenant des photos ensemble.  Remontant dans le véhicule, nous attaquons la dernière partie de la découverte de ce parc. Nous avons aperçu, seulement de très loin, quelques flamants roses qui occupaient les berges du lac mais rien à voir avec la population qui a pu y avoir quelques années auparavant. En revanche, je ne désespère pas de voir l’autre star du parc, qui pour l’instant n’a pas dénié montrer le bout de son nez, ou plutôt de ces doubles cornes faciales. En effet, nous n’avons pas vu les rhinocéros, ni celui à la corne noire, ni le bicorne blanc. La patiente va finalement payer. Près d’un étang, nous observons pendant plusieurs minutes une maman rhinocéros à corne blanche avec son petit. Le spectacle est grandiose. Ils sont impressionnants, volumineux. Il est aisé de comprendre la dangerosité de cet animal quand il charge. Même si n’arrive pas à t’embrocher avec sa corne, il piétinerait un homme sans même sans rendre compte. C’est dommage qu’ils n’aient pas plus de succès contre les braconniers qui les disséminent et les abattent, seulement pour la corne qu’ils revendent aux enchères à des prix déments… Malheureusement ces derniers ne jouent pas à armes égales. Ils ne leur laissent aucune chance avec des armes semi-automatiques, tellement puissantes que les balles traversent aisément la carapace corporelle de ces animaux. C’est une triste réalité, mais je ne pense pas trop longtemps à cette dernière, en admirant ces deux spécimens en liberté…

Je serais bien resté beaucoup plus longtemps à admirer ces animaux, mais l’heure qui tourne et l’intérêt tout de même limité des autres participants vont prévaloir. D’ailleurs, je trouve hallucinant que plus de la moitié des visiteurs vont ensuite s’endormir dans le bus jusqu’à la sortie du parc. C’est, par la même occasion, très touchant que Diego, qui était auparavant venu sur mes genoux, s’endorme dans mes bras. Grâce n’en revient pas. Elle trouve cela particulièrement mignon. Pour ma part, je profite de ce moment avec ce petit garçon mais je reste aussi les yeux fixés à l’extérieur, espérant apercevoir un lion, un rhinocéros à corne noire, ou autre spécimen magique de cette jungle encore préservée. Nous ne verrons rien d’extraordinaire, seulement quelques animaux que je n’avais pas eu la chance de revoir en cette journée. A 17h00, nous sortons du Parc. Nous retrouvons très rapidement la folle ambiance de la ville avec ces rues bondées. Je ne m’y attarde pas. Directement après avoir rejoints Fredrik, nous prenons un Matatu pour rejoindre Mbaruk et la maison de ces parents. Fredrik, Simon et leur maman sont très intéressés par mon aventure et les moments vécus… C’est impressionnant de voir comment ils dédient leur temps pour que je passe un bon moment en leur compagnie, comment ils sont au petit soin pour moi. C’est presque parfois gênant. J’aimerais pouvoir faire un peu plus que de participer financièrement à l’obtention des denrées alimentaires. Mais encore une fois je me fais une raison, le site Couchsurfing possède ce principe très fort, où l’échange et le rapport à l’autre ne mettent pas l’accent sur le côté financier, l’égalité entre les personnes pour les aspects matériels, mais plutôt sur l’apport culturel, l’échange grâce aux moments passés ensemble et sur l’intérêt d’apprendre grâce et avec autrui. D’ailleurs, cela n’aura jamais été aussi flagrant pour moi que lors de cette expérience. Lors des discussions, je réponds à de nombreuses questions de leur part, je leur apporte pleins de réponses et de solutions, ma vision du monde que j’ai développé avec mon éducation dans un mon occidental et les différentes expériences de vie dont celle que je continue d’approfondir en ce moment.
Les jours suivants, avec Fredrik, nous resterons près du village. Nous nous promènerons à pied dans les alentours qu’il connaît comme sa poche. Nous découvrons la vie des kenyans, en ruralité, mais avec une influence citadine indéniable. Je découvre l’école où travaille sa maman, les locaux de l’orphelinat et de l’organisation, qui aide des enfants en difficultés scolaires et comportementales. Je découvre quelques beautés naturelles telles que des fleurs que je n’avais encore jamais admiré. Je passe du temps avec les petits neveux et nièces de Fredrik, je cuisine des Chappattis avec sa maman, j’écris, je trie et sélectionne les photos pour mon blog. J’ai aussi pris ma décision concernant le safari à Masaï Mara. En effet, Simon me propose un prix défiant toute concurrence, plus intéressant que les compagnies les moins chères à Nairobi. De plus, je n’ai pas à partir à Nairobi pour ensuite rebrousser chemin. Simon se charger de tout arranger avec la compagnie, dont il est l’intermédiaire. Je dissocie bien le séjour chez eux et ce tour organisé que je vais faire. Simon débute dans le domaine. Si je peux l’aider à se développer, j’en serais ravi, surtout qu’il semble vouloir faire quelque chose de bien pour ces clients. Croyant à son projet, j’ai donc réservé un tour,  à partir du Mardi 19 Août, grâce à ces services. 
Nous nous levons à 5h00 pour partir en direction de l’Est, pour atteindre le croisement routier où je rejoindrais le groupe avec lequel je vais voyager. Simon veut s’assurer que tout se passera bien. Il a donc décidé de m’accompagner lui-même sur place. Comme souvent la chance me poursuit. Après avoir marché à pied jusqu’à la nationale, nous trouvons immédiatement, en moins d’une minute, un Matatu avec deux places qui part directement où nous souhaitons nous rendre. Selon, Simon cela n’arrive que très rarement! Comment alors, comme habituellement, ne pas se sentir la personne la plus chanceuse du monde et rester positif comme jamais… J’aime continuer à voguer sur mon petit nuage. Je n’ai vraiment pas envie d’en redescendre, surtout pendant les trois jours à venir! Nous arrivons donc très en avance. Simon me paie le petit-déjeuner. Puis nous attendons à un hôtel. Le mini van que je dois intégrer à pris du retard au départ de Nairobi. Je monte donc dans un autre de la même  compagnie pour me rendre à la prochaine étape. Dans ces milieux désertiques, dans des vallées encaissées, en direction du Sud, nous pouvons admirer d’impressionnantes tornades, qui se forment de toute part. Leur multitude, leur diamètre et leur force m’impressionnent. Je n’avais jamais vu ce phénomène de façon si prononcé. Sur le bord de la route, je peux aussi admirer les locaux vendre les produits qu’ils ont cultivés, ou promener leur bétail vers de plus beaux pâturages. Puis, nous arrivons finalement à Narok, où je déjeune en attendant mes compagnons pour ce safari. Un quart d’heure après la fin de mon repas, ces personnes font leur apparition. Je m’assoie à leur table et engage la conversation. Il y a deux anglais, Emma et Arnold, cinéastes indépendants qui viennent de tourner un court métrage avec une tribu kenyane. Ce groupe multiculturel est complété par la présence d’une chinoise et de trois amis français; Hélène, Pierre et Aymeri , qui font un stage dans une entreprise qui vend des roses à Nairobi. J’ai aussi mon premier contact avec James, notre guide, qui sera aussi notre chauffeur.
Il est plus de 13h00 quand nous quittons le restaurant. Je devine très vite que nous n’arriverons jamais comme prévu à 14h00 à l’entrée du Parc. Les faits ne vont que confirmer mes intuitions. Après plus de 3h00 de routes défoncées et de pistes, nous atteignons finalement le camp, en bordure du parc national. Avant que nous descendions, pour installer nos affaires, James nous demande ce que l’on veut faire… Je lui avais bien précisé qu’on m’avait vendu ce tour avec une excursion dans le parc dès le premier jour à partir de 14h00. Il me dit que ce n’était pas possible avec les départs tardifs de Nairobi. Il nous propose comme alternative de faire une petite marche et d’aller voir le village Masaï juste à côté. Cela ne me convient pas du tout. J’affirme que je veux faire un «Game Drive» (tour en mini van) dans le parc, même si c’est plus tard que prévu. J’ai en effet envie de passer le plus de temps dans ce dernier pour être en communion avec la nature, et voir ces animaux sauvages dans leur environnement. Heureusement, toute l’équipe me suit dans mon idée. Ils veulent tous aussi aller se promener dans le parc avant la tombée de la nuit. Nous ne faisons donc que nous enregistrer et déposer nos affaires dans nos tentes luxueuses et spacieuses; de vrais pièces de vie, avec salle de bain, avant de reprendre la route. 20 minutes plus tard, nous sommes vraiment aux portes du Parc National Du Masaï Mara!

Un safari au Kenya, comme en Tanzanie,  constitue une envolée inoubliable et exceptionnelle dans le temps, l’intrusion temporaire dans l’univers animal sauvage. Nous nous apprêtons, tel des hôtes de passages seulement, à visiter un royaume où les animaux y naissent, grandissent et s’y reproduisent… Nous allons essayer de ne pas trop interagir dans ce monde qui s’auto-équilibre, mais plutôt d’être des visiteurs contemplatifs, les plus bienveillants possibles! Alors que le soleil descend à l’horizon, nous observons un premier spectacle de grand acabit! Les animaux sont partout, paisibles. Nous pouvons les approcher de très près. Il y a des girafes, des buffles, des zèbres, de nombreux cervidés… Cela me satisfait déjà pleinement mais nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Après plus de 45 minutes, nous rejoignons quelques véhicules, dont les passagers admirent 4 jeunes lions mâles et une lionne. Nous passons de longues minutes à les admirer, alors que le soleil a disparu dans les nuages. Malgré un nombre élevé de véhicules, autour des animaux, j’en fais une nouvelle fois abstraction quand ils ne me bouchent pas la vue. Je suis concentré sur les animaux et le spectacle qu’ils nous réservent. Ces lions sont bien éveillés à cette heure tardive de l’après-midi. Nous n’avons malheureusement pas le droit de rester dans le parc la nuit tombée. Nous devons donc les laisser derrière nous et regagner la sortie.
Après avoir regagner le campement, alors que nous avons encore un peu de temps, avant que le dîner soit servis, je me joins aux Masaïs qui tiennent le campement. Malgré qu’ils travaillent avec des occidentaux, vivants des vies modernes, utilisant l’électricité dans le campement, eux conservent les modes de vie traditionnels. Ils viennent d’allumer un feu. Ils m’invitent à ce que je me joigne à eux. Même s’ils ne parlent pas trop bien l’anglais nous allons entamer des brides de conservations sur leur mode de vie. Je rejoins ensuite mes compagnons de tour pour dîner. Le buffet proposé est copieux et très bon. Nous échangeons  sur divers sujets, mais nous ne nous attardons pas. Nous avons une longue journée qui nous attend le lendemain. Le réveil sonnera tôt.
A 6h00 du matin, nous sommes sur le qui-vive. Après un buffet salé-sucré, dont des crêpes, des boissons chaudes, nous montons dans le mini van à 7h00. Voilà la journée complète, où nous allons nous aventurer le plus loin dans le parc. L’idée est d’aller au bord de la «Mara River», où se passe la plus intéressante partie de la grande migration annuelle des gnous et zèbres. En effet, c’est à ce moment-là que les animaux sont le plus vulnérable, qui peuvent trébucher et perdre la vie, se faire happer par un crocodile dans l’eau, ou dévorer par un lion affamé à la sortie. Je suis très impatient de me rendre dans le parc. Au Kenya, dans le parc de Serengeti, nous avions admiré les derniers retardataires, ou les résidents à l’année. J’espère bien donc voir ici les millions de bêtes dont on m’a tant parlé.

La journée commence superbement bien.  La lumière rasante du soleil, qui vient de se lever, embellie les couleurs de la nature et des animaux. Nous allons mettre à profit «les heures en or» des photographes, pour prendre quelques clichés sympas. La journée ne fait que commencer est, même si nous n’allons pas voir ce que j’espérais, la nature sauvage, surtout les fauves, les «3 grands chats», vont nous réserver un spectacle unique. Après une heure à arpenter le parc, nous tombons sur un guépard, en haut de sa bute de terre, qui observe les environs à la recherche d’une proie. Nous pouvons l’approcher de très près, l’observer dans de nombreuses positions. Il nous fait même un vrai «show» quand il commence à bailler. Je capture un cliché, assez exceptionnel  je trouve, de ce dernier en plein bâillement. Puis, après plus de 15 minutes, il décide finalement de prendre la poudre d’escampette, de s’enfoncer dans les fourrées derrière lui. Le rideau de la scène animalière ne se referme pas, il laisse juste la place à d’autres des acteurs majeurs de cette savane Kenyane.

Nous faisons quelques dizaines de mètres et, voilà, à l’ombre d’un petit bosquet, que deux lions se prélassent. Nous pouvons considérer qu’ils sont assez actifs pour des animaux qui dorment près de 20h00 par jour. Allongés sur leurs quatre pattes, les yeux sont pourtant encore ouverts et la tête redressée. L’un d’entre-eux décident d’emboîter le pas à son ami le guépard. Il commence aussi à bailler, laissant entrevoir une mâchoire conçue pour tuer et déchiqueter, des crocs aiguisés comme des lames de rasoir. Il s’amuse aussi un peu avec ces griffes rétractiles. Ils n’ont pas l’air très vaillant en ce début de matinée. Pourtant, je ne tenterais bizarrement pas de me rapprocher, à pied, trop près d’eux. Après nous avoir montré certains de leurs talents, ils décident aussi de quitter les lieux, mettant fin jusqu’à nouvel ordre aux spectacles des félins.

Nous observons ensuite les buffles avec pleins de petits oiseaux,  au bec jaune et rouge, sur le corps. Ils vivent en symbiose. Les oiseaux se nourrissent des parasites et autres insectes qui viennent déranger leur hôte en se posant sur leur peau ou en leur tournant autour. Nous observons aussi des groupes de plus en plus impressionnants d’animaux comme les gnous, les zèbres et leur merveilleuse robe, des antilopes, dont les plus grandes du Kenya, des gazelles… Je ne me lasse pas d’en voir, de les observer de plus en plus en près dans leur environnement naturel, de ne plus savoir où donner de la tête. Nous les voyons galopé dans cette savane beaucoup plus verdoyante que celle que j’avais pu observer, il y a un mois, jour pour jour, dans le parc de Serengeti. Le lien de cause à effet pour la grande migration est donc aisé. Les herbivores parcourent des centaines de kilomètres pour trouver de la nourriture qui s’est épuisé dans le sud en raison de la saison sèche et de leur consommation. Ils écoutent donc leur instinct de survie. Ils montent vers le Nord, traverse la frontière entre la Tanzanie et le Kenya, qui n’est qu’une histoire d’humain ne les intéressant pas vraiment. En revanche la traversée de la rivière Mara est une frontière naturelle dangereuse pour eux; une autre histoire, sur laquelle je m’appesantirais un peu plus tard.
Après quelques minutes de conduite sportive à travers de sublimes paysages, nous nous rapprochons des plus gros animaux terrestre actuels. Un groupe d’éléphants, avec un mâle dominant, mais aussi des éléphanteaux, se désaltère autour d’un petit point d’eau. A l’aide de leur trompe, ils avalent des litres d’eau. Ils s’amusent aussi à s’arroser. Même si j’ai pu déjà les observer de nombreuses fois, je suis impressionné de la dextérité avec laquelle les éléphants utilisent leur imposante trompe pour faire certaines actions très minutieuse, comme l’arrachage de touffes d’herbe. L’esprit de groupe leur donne une force encore plus importante que leur imposante stature. D’ailleurs, c’est en groupe et en file indienne, plus ou moins bien organisée, qu’ils quittent ce point d’eau pour regagner des espaces plus propices à l’ingurgitation d’une quantité très importante de végétation.  Les observer à l’œil nu, dans ce splendide environnement, est un vrai régal. Je ne peux pas m’empêcher tout de même de prendre quelques clichés photographiques qui figeront à jamais ces moments très spéciaux, vécus à côté de tous ces animaux. 

Comme dans tout environnement naturel, la vie et la mort sont parties prenantes de chaque journée qui s’écoule dans la jungle. Un équilibre naturelle se crée et régule la prolifération des espèces tout en donnant de la nourriture pour tous. Nous serons confrontés, à plusieurs reprises, au cours de cette journée, à la réalité de ce cycle de la vie. En premier lieu, des vautours et Marabouts déchirent les restes d’une carcasse de gnou, laissé à l’abandon, pas totalement nettoyé, par un des prédateurs qui évolue dans Masaï Mara. Ensuite une hyène, assez hideuse, se promène dans les parages,  à la recherche de son propre festin. Nous observerons ensuite une famille de phacochères qui se dandine, avec le mouvement bien reconnaissable de son postérieur, comme l’a si bien illustré le dessinateur du Roi Lion. 
Les guépards de Masaï Mara ont décidés de nous faire la fête, d’honorer plus d’une fois notre venue sur leur territoire. Nous pouvons admirer un spectacle d’exceptions en voyant une femelle guépard, avec ces 5 petits de quelques semaines, passée à proximité de nous. Ces petits guépards sont incroyablement mignons, une vraie petite bouille de peluche, avec lesquelles nous aimerions bien jouer, si cela m’impliquait pas de remettre en cause leur liberté et leur côté sauvage. Quoi qu’il en soit, les quelques minutes à leurs côtés resteront à jamais gravées dans ma mémoire.

Cela marquera aussi la fin de la matinée. Nous voyons ensuite quelques types spécifiques de cervidés et antilopes. Nous nous arrêtons à un point de vue imprenable sur la région. Nous pouvons voir facilement le tracé tortueux de la rivière Mara, à travers le Parc. J’interagis avec quelques Masaïs, en habit traditionnel, qui sont en charge d’autres groupes de touristes. Suite à cela, nous redescendons de ce rocher et nous nous installons, à l’abri d’un massif buissonneux, qui nous protège un peu des rayons du soleil. Nous y déjeunons un très complet et copieux pique-nique. L’ambiance est au beau fixe. Nous échangeons sur divers sujets; principalement le voyage et le règne animal. J’espère que l’après-midi va encore nous réserver de belles surprises dont celles de la migration à son apogée, l’instant de tous les dangers, où la tension est à son comble et chaque faux pas peut marquer la mort d’un ou plusieurs herbivores de telle ou telle espèce, à la recherche de la terre promise.
Le lieu, où nous nous sommes arrêtés pour déjeuner, n’est qu’à quelques encablures du lit de la rivière. Nous atteignons cette dernière après seulement quelques minutes à travers un chemin en terre accidenté.  Quand nous atteignons ces rives, il n’y a pas de traversée de gnous et zèbres à l’horizon. Plusieurs personnes m’avaient prévenue que pour voir ce spectacle il fallait être chanceux. Surtout à cette époque de l’année et à cet endroit du parc. Les traversées sont beaucoup plus fréquentes dans des endroits plus reculés, seulement atteignable en plusieurs jours. Il est de plus nécessaire que le chauffeur et guide fasse correctement son travail, en n’approchant pas de trop près le lieu possible de traverser des animaux. En effet, ces derniers sont à ce moment très peureux Ils ne tenteront pas le passage s’ils se sentent menacé. En revanche, une fois que le premier c’est lancé, qu’il a passé la rivière, la horde qui le suit va s’élancer dans un flux continu. Malgré l’effet de groupe c’est chacun pour soi. Chaque individu doit faire attention de ne pas se faire bousculer, ou piétiner par ces congénères avec un risque sinon important de périr d’épuisement ou par noyade. Il y a aussi les crocodiles qui veillent et qui n’hésiteront pas à prendre leur dime, ou droit de passage, pour ce franchissement de leur territoire. Même après la traversée, le danger est encore omniprésent. Affaibli par cette traversée harassante, ils ne pourront pas fuir ou esquiver l’attaque d’un fauve qui veillerait à l’affut sur l’autre rive ou à proximité.

Mais nous n’avons pas la chance, du moins lors de cette première approche de voir de l’action. Bien au contraire, la première attraction consiste au fait de visionner les gros pépères d’hippopotames, avachis de tout leur poids, sur un îlot boueux, au milieu de la rivière. Heureusement, les petits sont assez actifs. Ils en seraient presque attachants malgré le fait qu’ils ressemblent déjà à leurs parents en modèle réduit. De nombreux oiseaux, dont des grands échassiers, profitent de la fraîcheur du cours d’eau. Au près d’un deuxième troupeau d’hippopotame, nous pouvons observer d’énormes crocodiles et leur tout petit bébé qui, à notre plus grand désespoir, n’ont pas grand-chose à se mettre sous la dent. Plus le temps s’écoule, plus la chance de voir des animaux effectuer cette traversée de rivière s’amenuise. Elle va rapidement devenir nulle. Je ne vous cache pas que cela me déçoit un peu mais je m’étais préparé à cette éventualité en raison de la date tardive de notre présence ici, du fait que nous ne pouvons pas nous aventurer trop loin dans le parc seulement avec une journée pour faire le parcourt, sans avoir à notre disponibilité un hélicoptère ou un campement en plein parc. Peu importe, la nature et sa beauté dans la région vont continuer à nous combler!

Nous voyons en premier lieux de nombreux charognards qui se tiennent réunis dans un périmètre restreint. Nous allons ensuite très vite comprendre pourquoi. Un vrai cimetière de gnous a pris place dans la rivière. Ces derniers gisent sans vie dans le cours d’eau. Ils n’ont pas été attaqués ou dévorés par des crocodiles. D’ailleurs certains se trouvant à proximité ne daignent même pas croquer dans ce festin, peut-être un peu avarié, mais à leur disposition. Plus qu’ailleurs, leur instinct de tueur est aiguisé et ils veulent l’utiliser. La décomposition des corps des gnous n’a pas encore commencé pourtant cet énorme potentiel alimentaire est sûrement perdu, exception faite des insectes et petits parasites qui pourraient en profiter.
Après avoir assisté dans le calme à l’exposition de ce spectacle macabre nous repartons sur une dynamique plus positive avec l’observation de nombreux spécimens bien vivants. Nous commençons par des babouins, des oiseaux «secrétaires», sans compter les nombreux gnous et zèbres qui gambadent partout dans les environs. Quand je vous dis que les fauves font nous font la fête, en cette journée, les événements à venir ne peuvent pas me faire démentir. A l’ombre de petits buissons  deux guépards adultes se reposent. Nous nous rapprochons à moins de 2 mètres. Nous pouvons admirer leur beauté, les moindres détails de leur corps mais aussi en ce début d’après-midi leur passivité. Ils viennent de s’installer et ne bougent déjà plus que les oreilles. Ils peinent à garder les yeux ouverts. Même si c’est controversable, un autre mini van s’approchant de la scène va changer la donne. Un des occupants à une voiture télécommandée sur laquelle il a installé une Gopro. Il dépose le véhicule par terre. Il commence à le commander à distance. Les deux guépards sur leur garde sont maintenant réveillés, très menaçants. Dès que la voiture se rapproche trop près, ils montrent leurs crocs, ils se dressent sur leurs jambes, près à attaquer. Ils sont sur le qui-vive et se méfient «comme de la peste» de cet élément étranger qui semble vouloir les agresser, en pénétrant dans leur zone d’intimité. Le spectacle est intense. Nous restons de très longues minutes à les admirer. L’un d’entre-eux, tout particulièrement, nous fait part de toute une panoplie de grimaces et de faciès très expressifs.  Je prends un malin plaisir à en capturer un maximum de clichés mais aussi profiter de la proximité, car il n’y a pas alors besoin de zoom pour vivre le mieux la scène à travers l’appareil photo ou encore plus directement avec mes yeux ébahis. Ils sont à peine à deux mètres. J’ai presque le sentiment que je peux les toucher. Nous les avons déjà beaucoup perturbés. Nous décidons donc de nous retirer doucement pour les laisser retrouver leur quiétude, se reposer tranquillement, lors de ces heures les plus chaudes de la journée.

Je ne sais pas si nous avons, j’ai une bonne étoile mais l’intensité des moments vécus sont assez forts. Nous avons quittés ces deux guépards depuis seulement quelques secondes quand un des autres guides, avec qui il est de mèche et de pair, vient de lui annoncer la présence du 3ième gros chat de la région, que nous n’avons pas encore pu admirer. Seulement quelques minutes nous suffisent pour rejoindre le lieu de l’action et voir ce léopard faire quelques pas encore dans l’herbe de la savane, avant de grimper à un arbre. Il s’étend sur toute la longueur de son corps. Il doit reprendre son souffle, qui a sûrement été coupé par les actions menées auparavant. Nous pouvons voir son ventre et donc ces poumons se gonfler et se dégonfler  à une cadence très élevée. Ce fauve est majestueux. J’adore sa corpulence, sa couleur de peau et la beauté de son visage. Ce félin possède un charme indéniable que je ne fais que commencer à découvrir. Nous restons quelques minutes à ces côtés. Comme souvent, j’en veux  toujours plus mais je sais pourtant la chance que nous avons déjà eu en cette journée d’exception.  Surtout que nous enchainons sans transition avec un lion dévorant la fin de son festin qu’il a dû attraper en début de matinée.

Puis la fin d’après-midi nous permet de découvrir ou redécouvrir des espèces d’animaux peuplant cette région. Nous ne recevrons que quelques petites gouttes sur le véhicule. Mais de gros nuages gris à l’horizon, la présence combinée de la pluie et du soleil, permettent l’apparition d’un magnifique arc-en-ciel, qui vient parfaire une journée magique dans ce paradis animalier. Ce dernier doit être conservé coûte que coûte et j’espère que nous ferons le nécessaire pour que ce soit le cas. Après avoir observé encore des animaux dans leur milieu naturel, nous reprenons la route vers le campement. La soirée se passe au calme. Nos conversations seront très orientées sur ce que nous avons vu dans la journée. Je ne sais pas pour les autres mais je pars me coucher des étoiles pleines les yeux…
Le lendemain le tour n’est limité qu’à quelques heures de conduite dans le parc, avant de prendre la direction de la capitale. Cela va être court mais intense. Les lumières sont parfaites pour l’observation des animaux. La lumière rasante magnifie les couleurs des pelages des animaux. Nous revoyons les zèbres, les gnous, les buffles, des gazelles…  Trois lionnes nous font le plaisir de venir nous saluer avant que nous partions. Elles défilent même au milieu de nous et des quelques autres véhicules, présents à nos côtés. Je les aurais bien suivis, après qu’elles aient décidés de se mouvoir, de s’éloigner de nous. La possibilité qu’elles partent en chasse est grande. Mais ce n’est pas l’idée de la journée. Nous n’avons plus beaucoup d’essence, la jauge est au plus bas. Le chemin est long pour sortir du parc et ensuite faire le trajet jusqu’à Nairobi. Nous admirons encore, avant de sortir, les gracieuses girafes, venues trotter à nos côtés. L’une d’entre-elles nous fait la révérence, en broutant de l’herbe à même le sol! Des marabouts arrachent des bouts de chairs et de boyaux d’une carcasse encore assez fraîche d’un gnou. Je fais alors facilement l’amalgame avec les marabouts africains humains qui sont censés pouvoir guérir les maux, prévoir l’avenir, et envoûter leurs patients. J’espère que leurs présences est donc un bon présage et qu’ils préparent pour nous une potion magique permettant à chacun de poursuivre nos rêves tout en restant sur nos petits nuages…
Nous sortons finalement du parc. Une dernière interaction avec des Masaï, essayant de nous vendre des produits d’artisanat locale, puis nous prenons le large. James fait aussi une pause au niveau d’un grand centre touristique pour vente de produits de souvenirs en gros. Je ne suis pas fan du tout de ce genre d’endroit mais je n’ai pas d’autres choix que de suivre le reste du groupe. Je saisis donc l’opportunité pour explorer la diversité artistique des kenyans. Je regarde avec les yeux mais je n’achèterais rien, cela est convenu d’avance… Nous nous arrêtons ensuite pour le déjeuner dans un restaurant dont la qualité est largement supérieure qu’à l’allée. Après ce repas, nous rejoignons finalement la route de Nairobi. Encore un arrêt, en route, au niveau d’un point de vue sur la vallée du Rift! C’est une faille qui parcoure l’Afrique sur plus de 9600 kilomètres. Elle commence en Egypte, puis passe par le Soudan, L’Ethiopie, le Kenya, la Tanzanie avant de se terminer au sud du Mozambique. La vue est spéciale et particulièrement belle. C’est intéressant de prendre conscience de ce phénomène géologique fort.

Encore 2h00 de route, et me voilà dans la capitale du pays. Je n’avais eu qu’un petit aperçu de cette dernière, pendant quelques heures, il y a plus de trois semaines. Je vais maintenant y passer pas mal de temps, en tout cas dans sa banlieue proche. Depuis quelques jours, Je suis en contact avec un jeune informaticien indépendant. Il s’occupe aussi avec sa famille d’une association qui a pour but d’aider les enfants. C’est pourquoi, j’ai pris contact avec lui. Francis vit à Zambezi, à 20 kilomètres à l’extérieur du centre-ville de Nairobi. Nous nous retrouvons dans la capitale, à un endroit où il vient de finir un travail pour un de ces clients habituels. Nous rentrons ensemble chez lui en Matatu. Il habite une petite maison, en dur, assez confortable. Sa femme, Monica, est enceinte de leur deuxième enfant. Le terme est prévu dans moins d’un mois. Elle possède donc un joli ventre bien arrondi. Elle tient habituellement un salon de coiffure mais elle vient de le fermer pour s’occuper d’elle et de ces enfants. Leur premier, Elvis, a 3 ans. Je ne le rencontre pas les deux premiers jours. Ces grands-parents s’en occupent depuis plus d’une semaine pour soulager un peu Monica et Francis. Marie une de ces sœurs est venu  aider Monica pour remplir les tâches ménagères et éviter que se fatigue trop à la tâche.
Nous passons une première soirée simple à échanger à 4 sur divers sujets. Le lendemain, nous allons passer une soirée au calme avec Francis. Monica et Marie sont parties tenir l’échoppe d’une autre sœur, qui a un rendez-vous important. Elle ne peut donc pas tenir ces engagements concernant l’ouverture de son commerce. Elle confie la tâche à ces sœurs pour ne pas pénaliser ces clients. Avec Francis, nous prenons le temps, cuisinons le déjeuner, et décidons ensuite de partir découvrir les environs à pied. Même très proche de la capitale, je découvre une banlieue très rurale, tournée vers l’agriculture, avec de nombreux paysans et un centre de recherches de l’état concernant ce même domaine. La topographie du terrain est vallonnée, avec de nombreuses forêts de pins. Nairobi est une capitale assez haute en altitude car elle atteint les 1000 mètres au-dessus du niveau de la mer. La végétation va donc de pair. Ne voyant pas le temps passé, nous ne rentrons à la maison qu’à la nuit tombée. Monica rentrera encore bien plus tard que nous. La soirée sera simple, encore une fois, mais agréable avec une douche chaude, un bon repas chaud, encore de bonnes discussions et un grand lit confortable, qui m’attend dans une chambre d’invités, qu’ils ont libérés pour moi.
Le lendemain, avec Francis, nous nous rendons près de son village natal; Githarane.  Nous allons plus exactement, dans une église protestante de la localité, d’InNdeiga. Le père de Francis est pasteur dans cette localité. Mais surtout, Francis y mène, avec ces frères et sœurs, un projet qui lui tient à cœur qu’ils ont dénommés P.E.A.C.E.!  Ceux sont les initiales des différentes actions qu’ils ont mises en place auprès d’enfants orphelins ou défavorisés. Malgré la beauté de ces pays de l’Est africain, il ne faut pas oublier qu’une pauvreté latente touche la majorité des personnes vivant sur leurs sols. Malgré le développement plus important du pays, en comparaison avec  ces confrères africains; le Kenya ne fait pas exception à la règle. Je peux très vite le constater, après un trajet en Matatu, en avançant à pied, jusqu’à notre point de rencontre avec les enfants. Les familles vivent dans des conditions précaires. Leur maison est faite de bois et de terre. Leur source de revenu est quasiment nulle, pour sûr insuffisante pour nourrir, soigner ou éduquer avec décence les enfants. Francis souhaitait créer une aide quotidienne pour ces enfants. Voyant que son projet ne serait pas viable dans le temps, il a revu ces objectifs à la baisse, en proposant une activité hebdomadaire ludique, alimentaire, et instructive pour des enfants en difficulté dans cette région. Il faut être conscient qu’ils sont souvent laissés ou presque à leur propre sort, qu’ils ne reçoivent aucune aide de leur propre famille.

Francis n’a pas dans l’idée d’éradiquer cette pauvreté.  Cette dernière ne permettra jamais à ces enfants de s’en sortir. En revanche, avec la solidarité, une nutrition un peu meilleure, et des bases éducatives essentielles, il espère aider ces enfants positivement et leur donner l’espoir d’un futur meilleur. J’ai envie de participer à son projet, de partager mon expérience avec ces enfants, et si possible promouvoir son action auprès  de donateurs ou volontaires, qui pourront l’aider dans ces démarches. Il a donné rendez-vous aux enfants, le samedi après-midi, pour quelques heures de divertissement et de profits à leur égard.

Les initiales du projet   P.E.A.C.E signifie: Play (Jouer), Eat (Manger), Appropriate mentorship (apports appropriés de mentors), Critical Skills (connaissances et compétences critiques et minimales), Education (éducation). Les 3 heures passées avec les enfants se structurent donc en 5 phases différenciées.  En se retrouvant, les enfants commencent par jouer ensemble. La plupart du temps, il s’agit de football, mais d’autres idées d’activités physiques peuvent être apportées et développer. Quand nous arrivons, seul l’enfant du gardien est présent. La sœur de Francis arrive, un peu plus tard, avec le fils de ce dernier; Elvis. Trois autres enfants se joignent à nous. Cela s’arrêtera à ce nombre en ce jour. Nous sommes très loin des 20 enfants au moins escomptés. Je vois que cela perturbe Francis, du fait que ce projet lui tient à cœur. Il est donc un peu frustré  de voir que les enfants ne sont pas assidus. Une personne est venue  à son aide, voilà quelques années, quand ces parents n’auraient pas pu lui financer ces études. Il n’a aucune dette véritable mais il veut vraiment participer à un monde meilleur et essayer d’apporter sa pierre à l’édifice. Malgré ce nombre faible d’enfants présents, nous continuons les activités et allons les poursuivre jusqu’à leurs termes. Après avoir joués, nous nous réfugions dans l’église anglicane, alors qu’une pluie torrentielle s’abat sur la région. Francis se servira de cette raison, un peu plus tard, pour expliquer le nombre d’enfants présents bien en-dessous des prévisions qu’il m’avait prédites. Je crois malheureusement que la réalité est tout autre. Il a du mal à motiver les familles à autoriser leurs enfants pour le week-end à venir participer une activité ludique et éducative. C’est encore plus dur du fait qu’ils n’en détectent pas eux-mêmes l’intérêt fort pour leur enfant. Bref, ce n’est que ce que je pense qui est important. Que ça soit vrai ou non, je déplore le peu d’enfants qui profitent de cette aubaine, à portée de mains. Rien n’est demandé aux enfants si ce n’est qu’un peu de temps. En échange, ils pourraient recevoir tellement. A commencer par un bon repas! Cette fois-ci, il est à base de riz, de maïs et lentilles. En dessert, nous dégustons de bonnes bananes,  provenant d’un régime, que je viens d’acheter il y a à peine 1h00! La pluie ne cesse pas, faisant un vacarme tonitruant sur les tôles, qui recouvrent l’édifice religieux qui nous protège. Après avoir mangé, Francis intervient auprès des enfants. Il leur explique certains de ces points de vue, de ces pensées, de ce qu’il a vécu. Il me demande ensuite de prendre la parole, pensant que je peux être un mentor intéressant pour ces enfants. Je leur explique mes choix de vie, le fait qu’ils doivent croire en leur rêve et essayer de les mener à bien. Je leur dit aussi qu’ils doivent croire en eux, en leurs compétences et capacités. Francis me dira par la suite qu’il a été très content de mon intervention. Je n’avais rien prévu mais cela c’est fait naturellement après son intervention et devant ces enfants intéressants et intéressés par le fait d’apprendre. Avec sa sœur, ils vont ensuite leur redire certaines règles de base pour se présenter, respecter certaines règles de politesse, ou le simple fait de se laver les mains et de se moucher avant de manger. Pour le dernier thème de la journée, Francis laisse sa sœur, enseignante prendre la parole et mener les débats. Elle leurs rappelle quelques règles de base en anglais et elle introduit quelques formules simples de mathématiques, demandant aux enfants de participer. Après plus d’une heure et demie intensive, à discuter, nous avons couverts les trois derniers, mais non moins très importants, sujets de cette demi-journée. J’ai donc pu voir, par moi-même, l’intérêt de cette action. Les manques de moyens sont assez cruels et ce n’est pas à ma propre échelle, surtout actuellement que je pourrais lui apporter l’aide dont il a besoin. J’espère néanmoins que cela arrivera prochainement, surtout s’il continue dans cette voie. Je suis quoi qu’il en soit ravi d’avoir pris part à son action. Je vais essayer, comme je l’ai déjà mentionné, de la promouvoir du mieux que possible.  En effet, donner à de grands groupes humanitaires c’est très bien. Ceux sont pourtant les petites structures qui ont le plus besoin de soutien pour pouvoir mener à terme leurs projets. Pourvu que Francis y parvienne avec succès, en impliquant le plus grand nombre d’enfants possible. Je voulais prendre des photos pour promouvoir encore plus facilement son projet. Mais l’attente d’un nombre d’enfants plus nombreux, qui ne sont finalement pas venus et la pluie qui est entrée en jeux, auront anéantis ces possibilités pour l’aider un peu plus. Nous rentrons ensuite, non sans mal, à Zambezi sur des chemins de terre devenus très boueux. Nous passons la fin de soirée, déjà bien entamée, au calme.
Le lendemain, je décide d’aller faire deux ou trois des attractions majeures de Nairobi et ces environs. Je mets beaucoup plus de temps que prévu, plus de 3h00, pour me rendre au premier lieu désiré. J’arrive à 11h55, à l’intersection y menant, alors que l’orphelinat pour éléphant est ouvert, aux non-donateurs, seulement pendant 1h00, de 11h00 à Midi. Je peux  donc oublier cette première étape. Je file directement à la deuxième; le centre pour girafes. Malgré les activités très restreintes de ce dernier j’y passe un bon moment. En premier lieu, j’admire, depuis le sol, des phacochères à la recherche de nourriture, entre les jambes des reines de ce parc. Je suis à moins de quelques mètres de ces géantes de la savane, qui peuvent atteindre plus de 7 mètres de hauteur. Puis je monte sur le promontoire prévu pour les visiteurs. L’idée est de pouvoir  être à la même hauteur que la tête de ces charmantes girafes. De la nourriture en granulés est fournie à chacun pour essayer d’interagir du mieux que possible avec ces animaux domestiqués mais qui conservent leur instinct sauvage. Après avoir laissé passer, devant moi, plusieurs groupes de touristes pressés, j’ai l’occasion d’avoir un moment particulier avec les deux girafes qui ont déniés se rapprocher de la mangeoire humaine que l’on leur propose.  Je leur donne à manger, leur fait quelques câlins. Elles vont aussi venir à plusieurs reprises venir me faire un gros bisou baveux, alors que je leur tends un granulé dans la bouche. Même si l’attraction et l’interaction avec ces animaux peuvent poser question c’est tout de même drôle. De plus, ces animaux ne sont aucunement forcés. Elles viennent de leur plein grès. Je profite de leur présence, pendant de longues minutes, avant de décider de continuer mon chemin. Comme j’ai le temps, avant de repartir dans le centre-ville, je m’arrête près du parc national de Nairobi. C’est un lieu incroyable, où des animaux sauvages, vivent encore en liberté (limité dans ce cas, tout de même par des grillages électriques), à proximité d’une des plus grandes métropoles de ce continent.  Je ne souhaite pas me rendre en 4x4, ou autre véhicule dans ce parc. Je veux peut-être visiter  un centre qui se trouve à son entrée. Il s’agit normalement d’un centre de secours pour animaux blessés, abandonnées, ou incapables de survivre dans la nature. Je croyais pouvoir avoir une vraie interaction avec ces animaux, voir pleins de petits, et pourquoi pas jouer avec eux. Mais il n’y a aucun bébé fauve ou autres animaux majeurs. Il s’agit, en fait, plus d’un zoo qu’autre chose. Après ce que j’ai vécu ces derniers mois, je n’ai aucune envie de me rendre dans son antre. Je décide donc de reprendre mon chemin en direction du centre-ville. Je suis limité dans la découverte de ce dernier car quelques gouttes de pluies tombent en cette fin d’après-midi et le temps qui me reste est faible. Je retrouve en effet Francis, moins de 2h00 après, pour rentrer chez lui. Peu importe, cela ne me gêne pas plus que cela. Surpris par la pluie, nous allons devoir attendre de longues minutes au sec, afin que le déluge s’abattant sur Nairobi, diminue en intensité. Cela n’empêchera pas après d’être pris dans des bouchons importants et de mettre deux fois plus de temps qu’habituellement pour rentrer chez lui.
Alors que nous attendions sous le store en dur, d’un grand magasin, une énième personne va m’appeler Jésus Christ. Je n’ai pas évoqué ce fait depuis le début du récit au Kenya. Pourtant, depuis Kisumu, plus de cent personnes, au moins, sont venues m’interpeller et me dénommer comme l’un des icônes de la religion catholique. Je ne sais pas pourquoi cette recrue d’essence dans ce pays, en comparaison avec ces homologues africains que j’ai déjà visité. Je sais que les cheveux longs, la barbe assez longue, et la couleur de peau blanche, sont toujours les caractéristiques principales de la majorité des représentations de ce saint. Pourtant je n’arrive pas à comprendre pourquoi tant de personnes voient en moi, l’incarnation, au moins physique de ce dernier. Je ne peux pas y faire grand-chose, si ce n’est  en rigoler avec eux. Je n’ai aucune prétention d’être un saint encore moins Jésus Christ. Cela n’arrivera jamais ou alors il serait grand temps de m’enfermer dans un asile psychiatrique... Mais si cela peut donner le sourire à des personnes et leur remémorer leur foi, alors pourquoi pas me prendre au jeu, tout en gardant les pieds sur terre. Aucune chance que cela me monte à la tête. Même pendant mon Vol Libre, je reste assez terre-à-terre, surtout concernant ce sujet.  Je souris donc aux personnes qui me font la remarque et je me dis que le silence doit être la meilleure réponse, les laissant croire ce qu’ils voudront, en espérant que ce soit positif pour eux et leur vie à venir…

Aparté faite avec cette anecdote rigolote,  retournons à des choses plus importantes lors de ce séjour au Kenya. Chez Francis, je me sens vraiment en famille. Elvis m’appelle très vite «Uncle Mathew» (Oncle Matthieu). Les moments passés à leurs côtés sont sensationnels. La simplicité, qui les caractérise, me permet de me sentir bien. L’échange est important avec Francis, qui est un homme très ouvert. Elvis adore jouer avec moi et Monica fait tout ce qui en son pouvoir pour que je passe un bon séjour. L’échange et le partage ont lieux dans les deux sens et cela aide au bon déroulement de mon séjour. Malheureusement, ce dernier touche déjà à sa fin. J’ai aimé cette interaction forte avec les locaux et la proximité avec ces animaux sauvages d’exception. J’espère que l’homme, et surtout les braconniers, seront un jour se raisonner, que nous arriverons à sauver ces espèces menacés d’extinction à plus ou moins long terme… Je souhaite que nous ne continuions pas l’extermination massive de la faune et la flore terrestre; la plus rapide que notre globe n’est jamais enregistrée. J’ai des doutes mais mon positivisme me donne envie de croire que mes enfants et petits-enfants auront, un jour, la même chance que moi.

Nous sommes le 26 Août. J’ai réservé un vol, pour le lendemain, quittant l’Est Africain pour me rendre sur des îles rattachées à ce continent. Je passe une journée au calme avec Francis et sa famille avant de partir pour un long voyage, temporellement parlant. Depuis Nairobi, j’aurais pu avoir un vol direct. Ce dernier m’aurait coûté deux fois plus cher que l’option pour laquelle j’ai finalement optée. J’ai deux changements d’avion, le premier à Dar-Es-Salaam, après que l’avion se soit posé une première fois à Zanzibar. Mais avant ce premier atterrissage, tous les passages vont pouvoir vivre un moment d’exception. Je suis au première loge, le nez collé au hublot, quand nous passons à moins de 600 mètres du sommet du Kilimandjaro, à quelques centaines de mètres plus au Nord. La vue est extraordinaire. Je prends vraiment la pleine mesure de ce lieu, seulement un mois et demi après, en avoir atteint le sommet à pied. Cela complète un séjour magique dans ces trois pays que sont la Tanzanie, l’Ouganda, et le Kenya. 
Je n’avais pas pu obtenir au guichet à Nairobi, mes  2 autres billets électroniques pour la suite de mon périple. En transit, à Dar-Es-Salaam, je me rends donc immédiatement au bureau en charge des cas un peu compliqué. Le temps est compté mais je tombe pour mon plus grand bonheur sur une dame très compétente, qui se démène pour moi et bouge de son siège. Elle peut m’obtenir assez facilement le deuxième ticket pour le deuxième vol qu’elle me remet en main propre. Je n’ai plus alors qu’à me rendre dans la salle d’embarquement. Je n’avais pas pris conscience du lieu de destination où je dois passer la nuit en transit. Il ne s’agit pas de l’Île de Pemba, au Nord de Zanzibar, et appartenant à la Tanzanie, mais de la ville homonyme qui se trouve, au Mozambique, sur la côte du canal dont le nom est encore un homonyme du pays où je me rends. De quoi perdre son latin, non? Pour ne pas vous mentir, je n’ai cette fois-ci pas était assez attentif et je n’ai surtout pas pris la pleine mesure de mon choix, surtout concernant ce transit… Je viens donc de prendre le deuxième avion, en changeant de compagnie, mais sans avoir récupéré mon bagage au premier transit. Cela ne me rassure pas surtout que lors de l’enregistrement de mes bagages, l’hôtesse avait dit au départ que ce n’était pas possible d’assurer le suivi de mon bagage jusqu’à la destination finale et que je devais m’en charger à chaque fois. Au vu du temps du premier transit, cela n’était humainement pas possible. Elle a donc fait appel à un de ces collègues qui a trouvé une solution informatique. Mais cela sera-t-il effectif, physiquement parlant? Mon bagage voyage-t-il avec moi, vers le Mozambique? Voilà mon premier dilemme. Ensuite, Pemba, est sûrement un tout petit aéroport, qui ne reste pas ouvert la nuit. Je pensais passer la nuit dans l’aéroport, dans la zone internationale, avant de prendre mon vol le lendemain en début d’après-midi. Je ne sais plus si cela est envisageable. Il est pourtant hors de questions que je paie, même un visa de transit pour rentrer au Mozambique. Mes voisins dans l’avion me confirment que ma situation est délicate. Ils me disent que le prix du visa de transit et le même que le prix d’un visa de trois mois, c’est-à-dire 80$US. Je ne suis vraiment pas prêt à débourser cette somme.

A l’arrivée sur le tarmac, après être descendu de l’avion et attendant devant la porte d’entrée, où les officiels vérifient les carnets de vaccination et les passeports, je jette un coup d’œil sur le tapis roulant où descendent les bagages des passagers. Après quelques minutes, je peux pousser un soupir de soulagement quand j’aperçois mon sac-à-do s, avec ces poches latérales orange. Personne ne doit avoir le même, encore moins s’il est surmonté d’un tapis de sol gris. Le premier dilemme est donc réglé. Je ne suis pourtant pas sorti d’affaire. Un policier vérifie mon passeport. Il constate que je n’ai pas de visa. Il pense donc que je veux en faire la demande d’un à l’arrivée. Quand je lui réponds que «Non», il reste subjugué et pensif pendant quelques secondes. Il n’est alors pas sûr que j’aie bien compris sa question. Il l’a reformule. Je lui fournis la même réponse. Il décide donc de garder mon passeport dans la main, sur le même tas que d’autres personnes avec qui il rencontre des difficultés. Il va se charger des cas un par un. Il revient plusieurs fois vers moi. J’étoffe ma réponse qui ne lui convient toujours pas. Je lui explique que je suis en transit, que je ne veux pas payer le visa, que je ne veux pas sortir de l’aéroport. Comme tout aéroport proclamée et effectivement internationale, il doit posséder une zone internationale et de transit. J’ai acheté tous les billets en une seule fois et je ne démords pas de ma position. Il insiste pour que je paie le visa, prenne un taxi, paie l’hôtel et revienne le lendemain matin. Si je faisais cela, je perdrais beaucoup de temps et surtout tout le bénéfice financier des 28h00 de trajet au lieu des 4h00 pour le vol direct. Il n’est pas question que je cède.

Je lui dis que je n’ai pas d’argent liquide sur moi et pas d’argent pour payer ce qui serait nécessaire. Ce n’est pas totalement vrai même si je n’ai pas les 80$US dollars en liquide avec moi. J’attends donc patiemment que le policier revienne vers moi. Pris au dépourvu et sûrement pas habitué à traiter des cas comme le mien, il demande de l’aide à son superviseur ainsi que d’autres policiers. Tout se passe dans la plus grande courtoisie, sans énervements, sans élévation du ton de la voie de l’un ou l’autre des protagonistes.  Ils comprennent que je ne céderais pas à l’intimidation, ou avec le temps. Je suis, en effet, maintenant seul dans la salle d’attente. Je m’évade autre part d’un point de vue spirituel. Je ne suis plus vraiment connecté à la réalité. Je ne vois donc pas le temps passé. Le policier revient une énième fois vers moi. Ils garderont le passeport pour la nuit. Je m’apprête à passer cette dernière au poste de garde et de police de l’aéroport. Ils ont arrangés cela avec le personnel de garde ce soir-là. Je me retrouve donc dans une pièce en béton, avec toutes mes affaires, entourés de deux policiers forts sympathiques. Je peux installer mon campement. Après avoir lu un peu sur un des bancs présents dans la pièce, je sors et j’installe mon tapis de sol et mon «sac-à-viande», en soie.  Je vais dormir avec l’un des policiers pendant que l’autre fait la ronde. Je ne suis sorti de la zone internationale qui se trouvait dans le bâtiment de l’aéroport qui a fermé ces portes. Je suis donc illégalement sur le territoire du Mozambique, avec l’accord des forces de l’ordre. A y réfléchir, d’un peu plus près, j’adore cet état de fait et comment il est possible d’enfreindre la loi. Ce n’est pas une fierté, ni même quelque chose que je crierais sur les toits, mais je trouvais néanmoins important de vous faire part de cet état de fait…
La nuit se passe à merveille. Après le réveil, je m’attèle à mon travail d’écriture et d’organisation des photos. Je m’essaie de nouveau à la pratique du portugais dans le seul pays d’Afrique qui utilise comme langue officielle ce dernier. Nous partageons un petit déjeuner avec les policiers en garde cette nuit-là. Puis d’autres personnes prennent le relais. Un d’eux va m’emmener ensuite dans la zone d’enregistrement passager et des bagages. Il me rend donc à ce moment mon passeport, avant de le récupérer. Il me conduit finalement dans la zone d’embarquement. Il revient quelques minutes plus tard avec mon passeport, sans visa du Mozambique, mais avec deux tampons officiels du pays avec la date de la veille et du jour. J’ai donc officiellement posé les pieds sur ce territoire. Je ne me vanterais jamais de l’avoir visiter et c’est d’ailleurs un pays, encore loin du tourisme de masse, et que j’espère découvrir ultérieurement!